Hier soir j'ai tenté une fois de plus de lire le journal de Kafka. Alors le journal de K. ça commence comme ça : "les spectateurs se figent quand le train passe". Voilà. Ça fait des mois que je tente de résoudre cette chose qui doit bien vouloir dire autre chose. Parce c'est pas évident d'imaginer des spectateurs se figeant au passage du train. Quel train d'abord ? Et puis des spectateurs de quel spectacle ? Mais ça encore, ça va, ce qui me taraude le plus c'est qu'ils se figent. Parce que s'ils se figent c'est qu'ils bougeaient, et s'ils bougeaient sont-ce vraiment des spectateurs ? ... Et depuis des mois, mon œil reste collé à cette énigme avec la certitude que la solution ne se trouve qu'à l'intérieur même de cette ligne d'écriture.
Mais, hier soir après des dizaines de tentatives, les spectateurs qui étaient jusque là des individus avec une fonction floue sont devenus des lecteurs, et le train qui passe est devenu le journal que je tenais dans les mains. C'est là : je me rappelle de l'intensité de la précision du moment où j'ai décidé d'arracher mon œil de cette phrase et de fendre ce bouquin par le milieu.
J'ouvre, donc, une page au hasard et je lis : "1er août. Accompagner K. à la gare". Là, j'avoue : j'ai rit. J'imaginais la locomotive Franz que l'on apprête au quai, et la voilà qui démarre : elle grince, elle couine, elle siffle, elle souffle, craque, fume, du charbon (enfin de l'encre) plein la chaudière, elle gueule, elle ne sait pas ce qui lui arrive, mais elle s'élance... et moi, là devant, je suis comme un gamin stupéfait par la mécanique en mouvement.

Mais, hier soir après des dizaines de tentatives, les spectateurs qui étaient jusque là des individus avec une fonction floue sont devenus des lecteurs, et le train qui passe est devenu le journal que je tenais dans les mains. C'est là : je me rappelle de l'intensité de la précision du moment où j'ai décidé d'arracher mon œil de cette phrase et de fendre ce bouquin par le milieu.
J'ouvre, donc, une page au hasard et je lis : "1er août. Accompagner K. à la gare". Là, j'avoue : j'ai rit. J'imaginais la locomotive Franz que l'on apprête au quai, et la voilà qui démarre : elle grince, elle couine, elle siffle, elle souffle, craque, fume, du charbon (enfin de l'encre) plein la chaudière, elle gueule, elle ne sait pas ce qui lui arrive, mais elle s'élance... et moi, là devant, je suis comme un gamin stupéfait par la mécanique en mouvement.
